green mill

Le temps ne semblait pas avoir eu d’emprise sur le Green Mill. Ni sur l’homme assis à ma diagonale deux tables plus loin et qui n’avait cessé de me regarder. Ses yeux bleu acier étaient aussi mystérieux que le lieu dans lequel nous nous trouvions.

Calme et assuré, son verre de whisky à la main, il s’était avancé à ma table…et s’y était installé. Ce n’était plus un manque d’éducation, c’était une déclaration de guerre. Cet abruti empiétait sur mon espace vital et il me dérangeait dans ma communion avec le lieu.

Je ne savais pas si je devais lui sourire, l’ignorer ou partir. Il n’était pas aimable, moi non plus. Un petit jeu avait pris place : il me fixait, je lui jetais des regards de défiance et passait à l’ignorance. Ce jeu avait bien duré dix minutes. Tellement long. Enfin « regard d’acier » m’adressa la parole et s’en suivit un dialogue surréaliste sur un ton monocorde :

  • C’est la première fois que je vous vois ici.

  • Effectivement

  • Vous n’êtes pas d’ici.

  • C’est mon accent français qui vous fait dire ça ?

  • Vous êtes venue seule ?

  • De toute évidence.

  • Vous êtes seule ?

  • Quoi ?

  • Dans la vie, vous êtes seule ?

  • Non. Mon futur mari est très souvent en déplacement et je souffre d’une indépendance extrême.

  • Pas d’amis ?

  • Non, je suis arrivée il y a une semaine.

  • Vous êtes courageuse de sortir seule.

  • Comme je vous l’ai dit, je suis indépendante.

  • Vous l’avez trouvé ?

  • Je ne comprends pas.

  • Vous êtes à sa recherche, je le sais.

Sur cette dernière phrase, « Regard d’acier » quitta ma table.

A suivre …